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Alliance pour le logement : “Crise du logement : tous concernés, tous unis!”

Chronique d’une catastrophe sociale et économique annoncée

Si au niveau national, l’Alliance pour le logement a mobilisé ces dernières semaines toute une filière pour demander une véritable politique du logement… en Gironde, les acteurs du logement sont eux aussi dans l’obligation de se réunir une fois encore, pour alerter les pouvoirs publics et les citoyens de la tournure alarmante que prend la situation.
La crise depuis si longtemps annoncée frappe aujourd’hui de plein fouet, non seulement toute une filière économique garante du parcours résidentiel, mais également l’ensemble des concitoyens : étudiants, séniors, accédants à la propriété, ménages aux revenus les plus modestes, actifs et retraités, jeune travailleurs… Si rien n’est fait en urgence : le pire est à venir. « En tant qu’acteurs et parties prenantes du logement, il est de notre devoir de tirer la sonnette d’alarme et avant tout de proposer des solutions concrètes pour sortir de cette impasse sociale et sociétale d’ampleur ».
(Extraits des prises de parole du 4 octobre.)

Contributeurs : 

(de gauche à droite sur la photo de gauche)

  • Frédéric LESVIGNE, Président FNAIM Gironde (Fédération Nationale de l’Immobilier)
  • Jérôme BANDERIER, Président de l’UNAM (aménageurs)
  • Mathias SAURA, Président du MEDEF Gironde (Mouvement des Entreprises de France)
  • Muriel BOULMIER, Présidente de l’Union Régionale HLM en Nouvelle-Aquitaine (à l’écran à g.)
  • Sophie HOPENSZTAND, ARIA (Association Régionale de l’Ingénierie d’Aquitaine) (à l’écran à d.)
  • Pierre VITAL, Président de la FPI Nouvelle-Aquitaine (Fédération des Promoteurs Immobiliers)
  • Thierry LEBLANC, Président de la FFB Gironde (Fédération Française du Bâtiment)
  • Cécile DESPONS, Présidente de la CPME Gironde (Confédération des Petites et Moyennes Entreprises)
  • Franck SCHIKOWSKI, Président Pôle Habitat FFB Gironde (aménageurs, constructeurs, promoteurs et rénovateurs)Les

L’impact de la crise du logement

La crise du logement et du Bâtiment impacte toutes les infrastructures
des villes de nos concitoyens : c’est le cadre de vie de chacun qui est en risque »

(par la CPME)
La crise du logement est sans aucun doute un obstacle au recrutement. Selon la dernière enquête de conjoncture de la CPME : 1 salarié sur 10 renonce à donner suite à une offre d’emploi, faute de logement à proximité. Nos étudiants peinent à trouver un logement pour poursuivre leurs études. 50% des étudiants envisagent dès le 1er semestre d’interrompre leur cursus universitaire et plus de 12% d’entre eux abandonnent, faute de logement. Cette situation impacte les étudiants, leur famille et par conséquent les collaborateurs des entreprises du territoire. Le risque : des entreprises impactées dans leur développement ou leur maintien d’équipe. Avec une augmentation de près de 20% du prix des loyers, c’est une pression énorme sur les budgets familiaux qui s’impose. Le bâtiment ne se résume pas uniquement à la maison individuelle ou l’appartement ! Ce sont aussi des entrepôts, des laboratoires, des commerces, des lieux de vie et de divertissement. Toutes ces infrastructures constituent le tissu économique d’un territoire.

Passoires thermiques

Rénovation énergétique : de vraies mesures à destination des promoteurs rénovateurs sont nécessaires à court terme !

(par la FNAIM Gironde)
Les professionnels du secteur, agents immobiliers qui traitent 70% des transactions, administrateurs de biens qui gèrent 35% des logements loués et syndics qui administrent plus de 90% des copropriétés, portent un diagnostic unanime : le marché du logement amorce une crise grave dont les causes sont multiples.
Impact des taux d’intérêt et financement : la brutale hausse des taux d’intérêt a fortement affecté le secteur de la transaction immobilière, notamment avec la disparition annoncée du prêt à taux 0% pour la construction pavillonnaire. Cette situation a des répercussions sur les budgets des collectivités locales, dépendant en partie des frais de mutation. Inégalités fiscales dans la location : entre différents types de location (logement vide, meublé, meublé touristique) qui pénalisent les bailleurs de logements socialement utiles. Effets de la législation environnementale : la loi “Climat et résilience” impose des restrictions sur la location de logements classés en catégories énergétiques basses. Cela pose des défis en termes de coûts et de faisabilité pour les propriétaires et pourrait entraîner une pénurie de logements locatifs. Dégradation du statut juridique des bailleurs : évolution défavorable du statut juridique des bailleurs au profit des locataires, ce qui dissuade les investisseurs privés de s’engager dans le secteur immobilier.
La plupart des facteurs qui concourent au blocage du parc de logement privé procèdent de bonnes intentions, mais se révèlent contre-productives et forment aujourd’hui ensemble un carcan qui fait craindre que les moins favorisés n’aient plus accès au logement privé.

Rénovation energétique

Rénovation énergétique : de vraies mesures à destination des promoteurs rénovateurs sont nécessaires à court terme !

(par la FPI Nouvelle-Aquitaine)
L’objectif de décarbonation du secteur du bâtiment est un enjeu majeur. Principal outil pour atteindre cet objectif : accélérer le rythme et la qualité des rénovations énergétiques des logements, en particulier ceux considérés comme des « passoires thermiques ». Une stratégie qui est en train de bouleverser le marché de l‘immobilier ! On notera entre autres l’utilité de cette démarche à l’heure du ZAN, du manque de fonciers disponible à la construction du neuf et nous considérons que la construction de la ville sur la ville est une démarche qui va dans le bon sens. La rénovation / réhabilitation permet de baisser de 20% à 30% l’émission de gaz à effet de serre.
Mais à l’heure où nous manquons crucialement de logements, le rythme d’exclusion des passoires thermiques notées de E à G (Loi Climat et résilience) pousse les propriétaires bailleurs à vendre leur logement plutôt qu’à effectuer les travaux de rénovation nécessaires à leur mise en conformité. Les conséquences sont sans appel avec le retrait du marché locatif de 5.2 millions de logements à horizon 2034, selon l’observatoire national de la rénovation énergétique ! Il ne s’agit pas de remettre en cause cette disposition qui va clairement dans le sens de la transition écologique, en revanche dans un contexte actuel de pénurie, le calendrier semble précipité et ne fera qu’aggraver la situation notamment sur les logements de petites surfaces (70% classés de E à G) ! Dans un marché locatif en tension dans les grandes métropoles, sans solution pour remplacer ces petites surfaces, l’offre locative va se réduire. Et ceux qui seront les plus pénalisés seront les personnes ayant de faibles revenus.
De plus, le manque de moyens pour accompagner les opérateurs rénovateurs à produire du logement réhabilité est criant et rend l’équation économique impossible. Les ambitions de l’Etat sont hautes mais les moyens faibles et mal alloués. Il faut que de nouvelles mesures fléchées soient mis en oeuvre à court terme pour accompagner une feuille de route opérationnelle qui déclinerait les objectifs globaux en termes d’aides, de formations d’artisans, d’industrialisation de la filière etc… année par année et ne pas hésiter à débloquer des aides importantes à destination des immeubles entièrement rénovés pour envoyer un signal fort à la filière !
La rénovation énergétique est un sujet complexe qui trouve sa pleine efficacité quand les actes de réhabilitation sont faits à l’échelle globale de l’immeuble. Nous sommes d’accord avec le gouvernement sur le renforcement des aides à la rénovation mais en désaccord sur la façon d’utiliser les fonds publics principalement via MaPrimeRenov plutôt qu’auprès des pro.

> En complément, l’Union Régionale HLM Nouvelle-Aquitaine affirme :

Les partenaires souhaitent mettre en avant la transition écologique du parc, dont l’indispensable – et déjà engagée – rénovation des logements. Le calendrier fixé par la loi prévoit d’interdire progressivement la location des logements les plus énergivores : ceux étiquetés G à partir de 2025, puis les F en 2028 et les E en 2034. Si à l’échelle de la Nouvelle-Aquitaine, les classes les plus énergivores en F et G représentent moins de 4% du total du parc, la transformation des logements des autres classes est un enjeu majeur.

Or, contrairement aux annonces faites par le Président de la République lundi 25 septembre lors de la présentation de la planification écologique, les bailleurs sociaux ne disposeront d’aucune aide budgétaire pour assurer la rénovation énergétique classique des logements sociaux. Là où le plan de relance 2021-2022, puis le PLF 2023 avaient permis la mobilisation de 700 millions d’€ d’aides à la rénovation énergétique, le PLF 2024 ne prévoit rien et complique encore la tâche des bailleurs sociaux pour faire face à leurs obligations en la matière. En conséquence : des arbitrages de plus en plus marqués à réaliser entre constructions neuves et réhabilitations. Les enjeux de la SNBC, ce sont 125 000 réhabilitations par an en 2026 et 2027. Cette trajectoire ambitieuse n’est aujourd’hui envisageable qu’au détriment de la construction.

Mieux construire … 

Mieux construire, c’est bien…tous nous loger, c’est encore mieux !

(par ARIA)
Challenges Normatifs : les bureaux d’études en ingénierie du bâtiment doivent faire face à une évolution constante des normes et labels, notamment avec l’introduction de la Réglementation Environnementale 2020 (RE 2020), visant à améliorer l’efficacité énergétique des logements. Cela s’ajoute à d’autres normes, comme l’acoustique et l’accessibilité, le BBC (bâtiment basse consommation) ou NF Habitat, des dispositifs locaux comme le « Bâtiment frugal bordelais », etc. Cet empilement de normes ne doit pas nous faire oublier la nécessité de produire du logement pour y accueillir la population. De la nécessité de les coordonner ! On oppose le besoin immédiat de logements à une qualité de construction qui est trop longue. Il nous faut trouver un compromis entre quantité et qualité. En l’état actuel des labels et des normes, ce compromis n’est pas possible.
Équation Financière : les coûts de construction représentent 65-70% du prix total des opérations immobilières, avec le reste consacré à l’achat du foncier. Les efforts sur le coût des matériaux n’impactent donc que pour 2/3 le prix des logements…L’augmentation des coûts énergétiques, des transports et des salaires, ainsi que la pénurie de main-d’oeuvre, ont considérablement impacté le secteur, retardant les chantiers et augmentant les coûts. Certes, 2023 marque un léger ralentissement dans cette flambée de tarif mais après 30 à 50% de hausse en 3 ans, la situation est catastrophique.

Accès au logement

Allons-nous vers une génération sans toit ni loi ?

(par l’UNAM)
Acheter, c’est se prévenir des accidents de la vie, préparer sa retraite tout autant que se prémunir contre l’inflation, avec des taux fixes et des biens peu consommateur d’énergie. Il est indispensable d’agir sur ces freins d’accès au crédit ! L’UNAM dénonce l’absence de mesures d’urgence pour resolvabiliser les ménages et leur permettre d’acquérir un logement.
Sans dispositions concrètes et robustes à effet immédiat, la production de logement neuf va totalement s’arrêter (en Gironde entre 2022 et 2019 – année de référence avant COVID – c’est une perte de -55% de la production) et par effet dominos, achever de bloquer tout le parcours résidentiel des ménages, toutes générations confondues, créant ainsi une #GENERATIONSANSTOITNILOI !
Le logement qui représente 30 à 40% du budget des ménages, deviendra si rien n’est fait un produit de luxe pour nos concitoyens. Après des années à tirer la sonnette d’alarme, aucune décision forte à la hauteur de l’urgence n’est mise en oeuvre par le gouvernement, avec un PLF 2024 très en deçà du minimum vital pour sortir le secteur de la paralysie. La vocation des promoteurs est de permettre à chacun de disposer d’un logement durable et abordable. Les actions du gouvernement doivent renforcer le PTZ d’urgence et ne surtout pas le raboter ! Le gouvernement doit également prendre sa responsabilité vis-à-vis de ses concitoyens pour alléger les règles d’octroi des crédits (permettre d’allonger les délais d’emprunt, travailler sur le reste à vivre…). Afin de répondre aux attentes des citoyens, des solutions simples existent !

Difficultés d’Accès au logement

Difficultés d’accès à la location sur le privé comme le social

(par l’Union régionale Hlm en Nouvelle-Aquitaine)
Le constat est sans appel : baisse de l’offre, augmentation de la demande… le marché locatif est toujours plus en tension. Sur le marché privé, on assiste à une demande en augmentation de plus 50%, alors que le nombre d’annonces a baissé de 30% en deux ans.
Augmentation de la demande : la hausse importante des taux d’intérêt a entraîné une réduction significative des accords de prêts, empêchant ainsi certains ménages de devenir propriétaires. Cette diminution des achats a surchargé le marché locatif. S’ajoute à cela l’interdiction de louer des logements classés F ou G selon le Diagnostic de Performance Énergétique (DPE). Les propriétaires de ces logements énergivores, n’ayant ni les moyens ni l’envie de les mettre aux normes pour continuer à les louer, décident donc de les vendre. Dans le parc social, 172 000 demandeurs aujourd’hui en Nouvelle-Aquitaine, (contre 139 000 en janvier 2020 (en Gironde et sur Bordeaux Métropole 47 000, contre 42 000), et une pression en zone tendue de 7 demandes pour une attribution.
Une baisse de la production : l’augmentation inquiétante des coûts de construction/réhabilitation mène au mieux à d’importants retards, au pire à l’abandon d’opérations. Déjà entamée avant la crise sanitaire, la hausse des coûts de construction, de réhabilitation et d’adaptation a poursuivi son envol dès la reprise de l’activité économique (fréquemment +40% par rapport aux prévisions initiales de début de travaux). Les augmentations de coûts impactent la promotion privée comme les bailleurs sociaux, (pour rappel la promotion concourt à environ 50% de la production de logements sociaux). S’y ajoute l’inflation des normes générant de nombreux surcoûts tant sur les études et diagnostics obligatoires que sur les mises en oeuvre de solutions techniques. 

Impacts sur les entreprises et l’emploi

« Le droit au logement est un droit économique et social à préserver impérativement »

(par le MEDEF)
Le ralentissement économique est particulièrement perceptible dans la filière immobilière, avec des projections extrêmement préoccupantes. Le secteur est quasiment à l’arrêt malgré un besoin croissant de se loger et une situation pénurique notamment dans les métropoles.
Nous nous préparons depuis des années à une sérieuse crise du logement. Elle arrive, aggravée par un contexte macro-économique difficile, une demande de logements croissante et des mesures récentes contre-productives et inefficaces qu’il faut accompagner pour les rendre positives : suppression de logements dits « énergivores », plafonnement des loyers, loi ZAN ….

Le constat est sans appel :

  • En France, il manquerait à horizon 2030, 850 000 logements.
  • Parallèlement, la part du budget des ménages consacré au logement ne cesse d’augmenter et représente jusqu’à 45 % des revenus d’un ménage. Le logement constitue le principal poste de la crise du pouvoir d’achat ».
  • Les actifs sont contraints de s’installer toujours plus loin de leur lieu de travail.
  • En Gironde, il faut en moyenne 2 ans et demi pour se voir attribuer un logement social et 65 000 personnes sont actuellement sur liste d’attente.